L'anorexie masculine : mémoire d'étude d'Olivia

Je suis conscient qu'aujourd'hui mardi 30 septembre 2008, la mise à jour est importante en taille mais elle n'en reste pas moins très intéressante pour ceux et celles qui prendront le temps de la lire jusqu'au bout.

Olivia est une étudiante qui travaille sur le thème de l'anorexie et elle m'a fait part de son mémoire de recherche.

Vous allez pouvoir lire ci-dessous le chapitre III de son travail concernant l'anorexie masculine.

Je ne mettrai pas l'ensemble du mémoire sur le blog pour des raisons pratiques (plus de 140 pages) mais aussi pour des raisons de propriété intellectuelle, ce travail lui appartenant elle en est l'unique propriétaire. C'est à elle seule de décider de sa diffusion

Ceux et celles qui veulent lire l'entièreté de son travail peuvent soit s'adresser à Olivia via le forum soit m'envoyer leur adresse que je lui ferai suivre.

Petite précision, pour des raisons pratiques d'affichage j'ai été obligé de " faire sauter " les notes de bas de page. Vous les retrouverez si vous décidez de lire le mémoire complètement.

Chapitre III : L'anorexie masculine

Introduction

L'anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire qui affecte, particulièrement les adolescentes et les jeunes femmes. Après avoir été longtemps considérés comme une curiosité, les troubles du comportement alimentaire chez l'homme sont devenus récemment une réalité non exceptionnelle. En effet, la pertinence de ce syndrome chez le garçon, n'est considérée comme incontestable que depuis une vingtaine d'années.

L'anorexie mentale est souvent mal, ou pas, diagnostiquée chez l'homme. L'anorexie masculine est souvent ignorée dans les domaines cliniques, médicaux et scolaires, car la plupart des individus pensent que c'est un trouble présenté exclusivement chez les femmes.

Nous avons donc procédé à une recherche de la littérature concernant l'anorexie masculine. Nous avons trouvé de nombreuses études, mais, beaucoup d'entre-elles sont fragmentaires et même parfois contradictoires. Ceci est principalement dû à la taille réduite des séries étudiées et au fait que ces études sont en majorité réalisées chez des populations à risques (adolescents, étudiants, …). Néanmoins, les publications des cas cliniques ont l'intérêt de dégager une impression clinique.

Nous allons donc mettre en avant différents points que nous trouvons importants sur l'anorexie masculine que nous avons trouvé dans de nombreux articles et puis, plus tard dans ce travail, nous essayerons de les mettre en corrélation avec notre propre étude empirique.

Définition

Stieger définit l'anorexie masculine comme telle (1989) :

" La conduite alimentaire masculine associe restriction alimentaire, hyperactivité physique et plus ou moins fréquemment, selon les études, vomissements et abus de laxatifs. Les garçons anorexiques ressentent une peur panique de perdre le contrôle de leur poids, le plus souvent associé à une distorsion de l'image de leur corps. "

Historique

Le terme des " troubles alimentaires " est un concept moderne qui est basé sur des critères diagnostiques dont l'origine est relativement récente. Il est donc très difficile, à quelques exceptions près, de porter un diagnostic rétrospectif sur des cas anciens, puisqu'il est tout à fait impossible de leur appliquer le même type d'évaluation médicale que celle utilisée de nos jours. Toutefois, il est plus que probable que les troubles de l'alimentation, ou les épisodes répétés prolongés de " refus de se nourrir ", aient été des tableaux bien connus, mais souvent mal interprétés, longtemps avant que le terme " d'anorexie mentale " ait été proposé par Sir William Gull en 1873.

Bien qu'au début de l'étude de l'anorexie, différents auteurs incluaient des patients masculins (Morton, 1694 ; Gull, 1874), ceci n'a pas empêché que l'existence de l'anorexie masculine fût contestée et discutée jusqu'au milieu du siècle dernier. La preuve en est que, John C. Nemiah, en 1950, a exclu les sujets masculins de ses études pour la simple raison que l'aménorrhée, étant le principal critère diagnostic à cette époque, fait en sorte que l'anorexie mentale ne peut pas être une pathologie masculine. (Kidd et Wood, 1966).

Du Ve au XVIe siècle, les troubles des conduites alimentaires, non définis comme tels à l'époque, étaient considérés soit comme une élection divine, soit comme un signe de possession démoniaque, ce qui peut mener indifféremment à la canonisation ou au bûcher.

Plus tard, Richard Morton, né en 1637 dans le Worcestershire, fut le premier à décrire un syndrome incluant perte de l'appétit, aménorrhée et perte considérable de poids sans aucun signe de maladie connue (1689), mais également à cause de la qualité des différentes descriptions cliniques de ses patients. En 1689, Morton relate le cas du fils de son ami, le Révérend Steel, alors âgé de 16 ans. Il a perdu l'appétit en raison, dit-il " de ses études trop difficiles et de la passion de son esprit ". La description de Morton rappelle étrangement l'anorexie actuelle, et le fait le plus troublant est que, après l'échec de diverses méthodes thérapeutiques, le jeune homme finit par guérir lorsqu'il répond au conseil de Morton en abandonnant ses études et d'aller voyager quelques temps loin de sa famille. Richard Morton était peut-être à ce moment là le précurseur de la méthode de séparation familiale encore prônée aujourd'hui.

Dans cette description de Morton deux notions importantes sont à dégager : La première est que la perte d'appétit est liée à une activité intellectuelle trop intense, ce qui donne un fondement psychosomatique à l'anorexie. Selon la seconde, cette " première description détaillée " de l'anorexie fut faite chez une personne de sexe masculin, ce qui veut dire que temporellement, l'anorexie mentale masculine est aussi ancienne que l'anorexie elle-même.

Ainsi, les travaux laissés par Morton laissent bien supposer l'existence de l'anorexie mentale au XVIIe siècle…même si elle se limitait à quelques cas isolés et extraordinaires.

En 1790, Robert Willan, un dermatologue londonien, décrivait un remarquable cas d'abstinence. Il est admis qu'il fut le premier à décrire des anorexies mentales masculines. Plus tard, au cours de l'année 1873, la description de l'anorexie mentale par Ernest Charles Lasègue en France va permettre de définir cette " nouvelle affection ". Il met en avant les trois " A3 de l'anorexie comme nous l'avons vu dans notre premier chapitre.

Plus récemment, nous pouvons mettre en avant la première étude d'anorexie masculine qui a été faite par Crisp and Toms (1972) Elle décrit l'histoire de treize hommes anorexiques sur une période de dix ans, en comparaison avec cent soixante femmes anorexiques. De nombreuses autres études ont suivit et démontrent que l'anorexie chez le garçon est bien présente.

Prévalence

Même si l'anorexie est reconnue au masculin, elle reste rare. Il s'avère difficile de se faire une idée précise sur la prévalence de l'anorexie mentale masculine d'après les données de la littérature. Deux études sont citées par Flamand et Remy et concernent des populations d'adolescents ; ce sont celles de :

Rastam et al. (1989) qui, en examinant l'ensemble de la population scolarisée de Göteborg en Suède (n = 4290 sujets), ont estimé la prévalence cumulative (calculée entre 0 et 15 ans) de l'anorexie mentale chez le garçon à 0.09%.

Whitaker et al. (1990) qui, sur une population de 5 596 adolescents scolarisés, ne retrouve aucun cas d'anorexie masculine.

Plus tard, a partir d'une véritable étude en population générale adulte, Woodside (1994) a relevé, dans un échantillon représentatif de la population canadienne (n = 9 953), un pourcentage de 2% de forme complète ou partielle d'anorexie masculine selon le DSM IV. Ce chiffre parait très élevé. Le fait d'avoir pris en compte des formes partielles surestime la prévalence, mais cela indique aussi que la fréquence est probablement habituellement sous-estimée.

Les différences considérables entre les résultats des diverses études mentionnées dans la littérature, montrent bien que la prévalence chez le sujet masculin n'est pas exactement connue (contrairement à celle chez la femme, qui est estimée par toutes les enquêtes entre 0.5 et 1 %). Néanmoins de nos jours, nous pouvons hypothétiquement estimer la prévalence chez l'homme entre 0.05 et 0.15%, mais aucune étude sérieuse ne permet de confirmer ce chiffre.

Tout comme chez la fille, l'incidence de l'anorexie masculine serait en augmentation depuis plus ou moins vingt-cinq ans. Il est difficile d'en déterminer les causes. On peut citer une progressive indistinction masculin/féminin dans les standards sociaux assortie d'un intérêt croissant pour l'esthétique masculine.

Pourquoi les hommes sont-ils moins touchés par l'anorexie ?

Dans cette partie, nous allons essayer de mettre en avant différentes théories qui expliqueraient cette si grande différence d'incidence entre les hommes et les femmes.

Chabrol H. donne à ce phénomène différentes explications mais dont on n'a pas de preuves tangibles :

Le rôle assigné dans la famille et dans la société est différent entre les genres.

Chaque sexe a ses particularités psychologiques, biologiques, endocriniennes.

Les relations avec les parents sont différentes suivant le sexe.

Les modes de maturation sexuelle et la façon de vivre la puberté sont également différents selon les sexes.

En effet, De Tonnac (2005) pense que c'est parce que les garçons connaissent leur puberté plus tard que les filles (deux ans en moyenne), qu'ils sont en partie préservés de ce trouble. Ce retard leur laisse certainement le loisir de développer des comportements d'adaptation aux changements pubères.

Alors que l'obsession de la minceur est vue comme " normale " pour la femme, la préoccupation corporelle d'un homme est vue comme une identification féminine " anormale ". De ce fait, il est difficile pour les hommes qui souffrent de ce trouble de se dévoiler de peur qu'ils ne soient pas pris au sérieux ou bien qu'ils soient vus comme étant " moins masculins ". En conséquence, de nombreux hommes anorexiques ne se reconnaissent pas comme ayant des troubles du comportement alimentaire. Comme nous l'avons déjà dit plus haut, nous pensons donc qu'il a un manque de diagnostique de l'anorexie chez le jeune homme. Selon Scott D.W., il y aurait quatre raisons à cela :

Les patients peuvent être embarrassés de dénoncer leurs symptômes au docteur.

Les hommes peuvent se croire non vulnérable au trouble parce que les médias parlent souvent de l'anorexie mentale comme étant un trouble féminin.

Les docteurs peuvent ne pas avoir les outils pour dépister le trouble au masculin. Ils vont plus facilement lancer un tas d'examens cliniques pour trouver la cause de la perte de poids.

Les cliniciens peuvent trouver difficile de dépister le trouble chez l'homme car il est souvent accompagné de caractéristiques psychopathologiques (plus de plaintes au niveau somatique).

Cherchons maintenant d'un autre point de vue : Y aurait il une prédisposition génétique liée au sexe qui permettrait de réguler la faim ? Brusset (1995) rappelle en effet que chez les garçons, la testostérone protègerait des TCA mais l'apparition de celles-ci en abaisserait le taux. Néanmoins, la position communément admise actuellement, est que l'hypothèse d'un dysfonctionnement hypothalamique n'est que " secondaire " à un trouble psychique primaire. Tout en restant dans cette idée de la physiologie, Steiger (1989) pense que, comme les hommes ont moins de graisse que les femmes, cela pourrait réduire leur susceptibilité à développer une préoccupation pathologique du poids.

D'autres auteurs ont émis des hypothèses à ce sujet. Notamment Margo (1987), qui pense que la différence de prévalence entre hommes et femmes, pourrait s'expliquer, par le fait que, les hommes sont moins vulnérables que les femmes à développer une anorexie mentale, à la fois au niveau biologique (génétique et hormonal), au niveau du développement émotionnel ainsi qu'au niveau de l'impact des facteurs sociaux.

Selon ces différents points de vue, nous pensons que le fait que l'homme est moins touché par l'anorexie que les femmes est un ensemble d'éléments. En effet, il y a certes un aspect socio culturel qui est primordial mais à côté de ça, nous avons également un comportement particulier du jeune homme ainsi qu'une disposition physiologique différente de celle de la femme (hormones, génétique,…). Mais en tout état de cause, nous pensons que ce sujet nécessite un approfondissement.

Le diagnostic

Etant donné qu'il n'y a pas d'aménorrhée chez le sujet masculin, nous pouvons mettre en avant un dysfonctionnement de la production de testostérone. Cette diminution de testostérone résulte en une diminution du désir sexuel et de la performance. Elle devrait être incluse dans les critères de diagnostic. Mais cette perturbation endocrine est difficile à évaluer. Vous trouverez en annexe un questionnaire dédié au diagnostic de l'anorexie masculine faite par un étudiant américain.

Tableau clinique

Age

La moyenne d'âge dans l'anorexie masculine est importante à considérer en terme d'influence sociale sur le développement de la masculinité. Nous avons trouvé différents points de vue quand à l'âge de début de l'anorexie chez le jeune homme.

Tout d'abord, il y en a qui pensent que l'anorexie est un trouble pré-pubaire. Dans cette catégorie nous avons les chercheurs Fastein et al. (1956) et Brush (1971) qui conçoivent que l'âge moyen est entre 10 et 12 ans.

D'autres, comme Muise et al. (2003), Crisp et Toms (1972), Burns et Crisp (1983) et Hassan et Tibbetts (1977), démontrent que les moyennes sont de plus ou moins 16-17 ans. En effet, Crisp et Toms pensent qu'à cet âge, les jeunes entrent dans le début de la vie adulte. Ils doivent prendre des décisions importantes : éducation, famille, carrière,… Devant cette pression, les hommes sont supposés être forts et brillants. A la place, certains de ces jeunes hommes choisissent de dénier cette pression et de tourner la frustration vers eux-mêmes. Si leur vie semble leur échapper, au moins ils peuvent garder le contrôle sur leur corps par leur comportement alimentaire.

Nous pensons donc qu'il est difficile d'émettre une moyenne d'âge exacte de l'anorexie masculine. La plupart des études ont été réalisées sur des petits échantillons de population et à des périodes différentes, ce qui rend difficile une généralisation. Néanmoins, nous partons sur l'hypothèse que l'anorexie est un trouble de l'adolescence qui arriverait un peu plus tard chez l'homme que chez la femme car l'adolescence, en elle-même, arrive plus tard chez le garçon que chez la fille.

Poids

Selon Crips et Burns (1972), les hommes sont plus probables d'être en surpoids que les femmes au moment de l'installation du trouble, mais ils enregistrent des poids plus bas à certaines périodes de la maladie, en particulier au début de la prise en charge.

Durée

La durée de l'anorexie masculine est de cinq mois à douze ans avec une moyenne de trois ans et cinq mois.

Hyperactivité

L'hyperactivité physique constitue le premier volet de la différenciation clinique entre l'anorexie de l'homme et celle de la femme. Cette hyperactivité physique est nettement plus marquée chez l'homme, contrairement à l'hyper investissement intellectuel, qui est beaucoup plus prononcé chez la femme. En effet, la société met l'accent sur la réussite athlétique du jeune homme. Ceci explique que les hommes ont plus souvent recours à l'exercice physique plutôt qu'à la restriction alimentaire pour perdre du poids (Dummond, 2002). La société perçoit le fait de se restreindre de manger comme étant une façon féminine de perdre du poids. Consécutivement, la plupart des jeunes hommes qui font de l'exercice pour perdre du poids ne voient pas cette pratique comme étant une technique de régime, mais comme un comportement normal masculin (Drummond, 2002). Selon l'étude de Burns T. and Crisp A.H, 44% des hommes anorexiques seraient " trop actifs ". Mais il est difficile de déterminer ce qu'est " trop actif " !

Personnalité

Certains auteurs ont étudié la personnalité du jeune homme anorexique. L'étude de Curry J.F. et Hamlett K.W., démontre que le garçon anorexique serait obsessionnel et souffrirait d'une perturbation affective. D'autres, comme Hassan et Tibbetts (1977) ont décrit l'occurrence d'hyperactivité, de dépression, d'irritabilité et d'anxiété. Ils seraient perfectionnistes, auraient une pensée obsessive, seraient agressifs passifs, dépendants et introvertis.

D'autres, comme Vandereycken et Van den Broucke (1984), se sont plus penchés sur la psychopathologie. Ils ont remarqué une prévalence élevée de traits d'introversion et de schizophrénie (30%) ainsi que des troubles obsessionnel (29%), dépendant passifs (15%) et des traits anti-sociaux (18%).

Etiologie

De nombreuses études sur l'étiologie de l'anorexie mentale se sont basées sur des échantillons de population féminine. Les résultats ne peuvent donc pas être généralisés aux hommes. En effet, il pourrait y avoir d'autres facteurs jouant un rôle dans les prédicateurs d'une mauvaise estime de soi et le résultat d'un trouble du comportement alimentaire chez l'homme. L'étiologie de l'anorexie masculine n'est donc pas claire. Différents auteurs mettent en avant des hypothèses ou des observations. Nous en citerons quelques unes.

Premièrement, Crisp et Burns (1983) ont émit l'hypothèse que c'est en rapport avec un problème d'identité sexuelle dans la personnalité pré morbide. Nous reviendrons sur cet aspect plus tard, dans notre chapitre consacré à la vie affective et sexuelle des jeunes hommes anorexiques.

Dans un registre par rapport à l'image corporelle, nous avons Keel et al. (1997) qui ont suggéré que la façon dont les hommes perçoivent leur corps, peut influencer le début d'un TCA. Par contre, Hall (1985) pense que, comme les hommes sont moins influencés par la pression du régime, il faudrait des facteurs de risque additionnels qui les induit à faire régime. Néanmoins, ce même auteur constate une corrélation entre un surpoids avant le développement du trouble et la maladie. Kearney-Cooke et Steichen-Ash (1990) ont également trouvé que la plupart des hommes anorexiques affirmaient avoir été victimes de commentaires négatifs sur leur poids. Ils étaient souvent les derniers à être choisis pour les compositions d'équipes athlétiques étant jeunes.

Tout comme chez la femme anorexique, nous trouvons des événements déclenchants tel qu'une expérience de séparation (décès d'un proche, déménagement,…), ainsi que des périodes de moqueries de l'entourage par rapport au poids du patient (Sharp C. et Clark S., 1994). Par contre, selon Agman G. et Chambry J. (2006), il y aurait moins d'antécédents de maltraitance sexuelle chez les hommes que chez les femmes anorexiques.

La famille

Dans les familles d'anorexiques, on retrouve souvent une restriction des émotions négatives. Ces familles sont caractérisées par une relation déstructurée, pauvre, investie ou détachée émotionnellement et un manque d'affection et d'empathie. Les valeurs de cohésion, de loyauté et de sacrifice sont prônées. Minuchin décrit les familles anorexiques comme trop investies, rigides, trop protectrices et évitant les conflits. L'individualisation est fortement découragée.

Relation avec le père

De nombreux auteurs se sont intéressés à la relation du jeune homme anorexique avec son père, ainsi que le modèle de virilité que ce père présente. Ces études reflètent une pauvre relation père fils souvent accompagnée d'un conflit. Le plus souvent, le père est distant de son fils. Ces pères ont également été perçus comme prônant une image culturelle forte de la masculinité : un homme virile, fort, musclé, ne pleurant jamais, etc. Ils sont également souvent impliqués dans des comportements négatifs, associés à la masculinité, comme une surconsommation d'alcool,…

" Sur le plan des interactions familiales, le père est décrit comme étant soumis à la domination de la femme, son identité est mal assurée du fait en particulier de la prévalence de ses identifications féminines et de la prégnance de l'imago maternelle (…) les pères se situent dans l'effacement et la " dévirilisation " : ils laissent la mère occuper le devant de la scène et envahir la place du fils (….) le père n'assume pas son rôle paternel étayant et protecteur. "

Relation avec la mère

Contrairement au manque d'application des pères, les mères des garçons anorexiques sont souvent décrites comme étant trop investies. Il y a une sur-protection et une sur-dépendance entre le garçon et sa mère. Il y a une séparation difficile et un manque de barrières. Plusieurs études pensent qu'un surinvestissement de la mère dans la vie du patient peut amener à une identification avec elle et causer des problèmes d'identification sexuelle. En effet, " Albert et al. (1984) décrivent les familles d'anorexiques masculins comme des familles qui semblent souvent " fonctionner sur un mode matriarcal, avec une relation d'interdépendance entre la mère et le fils anorexique ".

Brush (1971) insiste sur la particularité des mères, à imposer au développement de leur fils, leurs propres conceptions, au détriment de la personnalité propre de l'enfant et sur les difficultés d'adaptation de ce fils à vivre des situations où il doit faire preuve d'indépendance.

Par ces différents auteurs, nous voyons donc qu'il y a un lien très fort entre la mère et son fils. Ceci serait en partie la cause du développement de l'anorexie. Le jeune homme aurait difficile de se séparer de sa mère et refuserait donc sa masculinité pour ne pas ressembler à son père.

Le socio culturel

Traditionnellement, l'estime des hommes et leur identité étaient basés sur des facteurs multiples, tels que l'intelligence, le statut économique, la carrière, les relations sociales et le pouvoir physique. Pendant longtemps, les hommes n'étaient pas perçus comme connectés à leur corps mais plutôt à leur tête. Alors que l'identité des femmes est déterminée par la beauté. Le corps était la sphère féminine (Petrie et Rogers, 2001) De plus en plus, les hommes commencent à ressentir les mêmes pressions de l'image corporelle que la femme. Ils commencent à intérioriser cette pression sociale effectuée sur le physique. La société occidentale augmente le centre d'intérêt porté sur le corps de l'homme. On met l'accent sur un corps athlétique.

Le corps est un lien entre la masculinité, son regard sur lui-même et son estime de soi. Le corps devient un objet central. Ce qui était traditionnellement des préoccupations féminines, comme la perte de poids, la mode et la chirurgie esthétique, sont maintenant présents dans les préoccupations masculines. Il y a de plus en plus de publicités qui représentent des hommes parfaits. Il y a une certaine pression d'obtenir un corps parfait.

Hiérarchiquement, la masculinité est née des raisons pour laquelle les hommes " internalisent " la pression sociale et culturelle et tournent cette pression en un problème émotionnel et psychologique associé à l'anorexie mentale.

Toutes ces pressions sociales sur l'homme que nous avons énoncées sont des pressions qui pourraient influencés le développement d'une anorexie, tout comme certains auteurs disent que c'est le cas pour les femmes. De notre point de vue, nous pensons que la société à certes son rôle à jouer dans le développement d'une anorexie, que ce soit chez un sujet féminin ou masculin.

L'image corporelle

La question de l'image du corps est une question complexe. Dans cette partie, nous comptons n'en aborder qu'une couche superficielle afin d'essayer de mieux comprendre le garçon anorexique.

L'image corporelle est complexe, car elle comprend la surface, le profond, l'image posturale du corps, tout comme les attitudes, les émotions et les réactions personnelles de l'individu à son corps. A cela nous devons ajouter les attitudes culturelles. Le corps, tout comme les objets, peut devenir un écran sur lequel on projette ses inquiétudes les plus profondes (Fisher, 1996)

Tage D., Good G., and Morrison J.B. (2006) ont fait une étude sur l'image corporelle de l'homme et son bien-être psychologique. Depuis plusieurs années, les jeunes hommes semblent être en conflit avec leur apparence physique. La prévalence du diagnostic chez l'homme apparaît être en hausse (Braun, Sundy, Huang, and Halmi, 1999). L'usage des stéroïdes et des suppléments utilisés pour améliorer l'apparence ou la force a augmenté fortement chez les sujets masculins. Cette utilisation paraît corréler avec une préoccupation du poids, une insatisfaction corporelle et une plus grande consommation des magazines d'hommes. (Fiel et al. 2005). De plus, nous voyons que les hommes tout comme les femmes, semblent comparer leur corps avec l'image d'un corps idéal, inaccessible, qui représente l'idéal de masculinité. Ils mesurent leur potentiel à leur apparence. L'inquiétude au sujet de l'image corporelle n'est pas seulement féminine. En effet, notre société accentue les idéaux de restriction et le physique comme marqueurs du statut masculin et féminin. Le corps idéal devient un but, ce qui amène à une mauvaise image de soi.

Le traitement

Selon Soban C. (2006), l'anorexie masculine est un problème unique qui doit être adressé d'une façon appropriée pour le patient masculin ; et ceci avec ses spécificités émotionnelles, psychologiques, sociales et culturelles. Soban C. pense que le traitement consiste à voir l'anorexie au masculin, comme étant son propre trouble avec un traitement spécifique qui s'adapte au genre. Souvent, l'évidence suggère que quand un diagnostic d'anorexie est posé sur un homme, il est fait dans un contexte de troubles alimentaires étant perçu comme un trouble féminin. Par exemple, l'anorexie est souvent attribuée aux hommes homosexuels et aux hommes dont l'identité sexuelle est plus féminine.

De plus, Connel (1995) propose un traitement spécifique pour les garçons anorexiques. Il dit que le traitement doit guider ces jeunes hommes dans un développement correct de leur perception du corps, qui doit prendre en compte leurs besoins émotionnels, psychologiques, sociaux, et culturels. Chaque facteur de l'anorexie masculine devrait être adressé en relation avec le courant social de la construction de la masculinité. Nous devons garder en tête qu'il n'y a pas spécialement une seule façon d'être un homme. Peu d'hommes atteignent cet idéal et la société contribue donc à affaiblir tous ces hommes qui n'y arrivent pas.

Il serait intéressant d'apprendre aux jeunes hommes le rôle que la société joue sur leur développement en tant qu'adolescents. La façon dont la société peut altérer leur image individuelle, etc. L'homme idéal est une construction sociale impossible à atteindre pour l'être humain.

Conclusion

Dans ce troisième chapitre, nous avons voulu nous centrer plus spécifiquement sur notre thème de départ : l'anorexie masculine. Il est vrai, que nous avons dû aborder l'anorexie en général avant de la spécifier, car la plupart des études ont été élaborées de cette manière et il nous semble donc important de faire de même afin d'avoir une vue globale du thème.

La société a toujours vu l'anorexie mentale comme étant un problème féminin et les hommes qui souffrent de ce trouble sont isolés, ignorés. Nous pensons qu'il faut casser ce stéréotype de l'anorexie féminine et faire sortir ces jeunes hommes du silence.

L'anorexie masculine est un problème qui doit être pris en charge avant qu'il ne devienne une épidémie. En effet, nous avons vu que ce trouble est en augmentation dans la population masculine.



30/09/2008
1 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 183 autres membres